Répression • 1790-1945 Voir dans l'inventaire Ajout à votre panier

Présentation du contenu

La sous-série 4 I est constituée des archives relatives aux établissements de répression, à savoir les maisons d'arrêt, de justice et de correction ainsi que les dépôts de mendicité dont la vocation a longtemps oscillée entre répression (lieux d'enfermement) et assistance (lieux de travail et de soins).

Maisons d'arrêt, de justice et de correction

Au début du XIXe siècle, les maisons d'arrêt, justice et de correction de Nancy sont des petites prisons approvisionnées par les juridictions nancéiennes. La maison d'arrêt est destinée à recevoir les prévenus, la maison de justice les accusés dans l'attente de leur jugement en cour d'assises et la maison de correction les condamnés aux peines de moins d'un an et ceux dans l'attente de leur transfert dans une maison centrale (Ensisheim, Clairvaux…) ou au bagne. Néanmoins, jusqu'au milieu du XIXe siècle, cette répartition est théorique, car dans les faits, les détenus sont placés dans les prisons nancéiennes au gré des capacités des établissements.

La maison d'arrêt de Nancy est placée auprès du tribunal de première instance, rue de la Monnaie. La maison de justice, aussi appelée conciergerie, est mitoyenne au Palais de Justice, place Carrière. La maison de correction occupe le bâtiment de l'ancienne manufacture des tabacs, construit en 1716 et situé rue du Rempart (rue de l'Équitation), depuis le 8 juin 1820, date de son achat par le département de la Meurthe pour y établir la maison de détention de Nancy. Les travaux d'aménagement débutent en 1824 et les premiers détenus sont transférés à la prison de la « Tabagie » en 1832.

Face à l'insalubrité, aux mauvaises conditions de détention et la surpopulation carcérale, le département vote en 1854 le principe de la réunion des trois maisons sur le site de la prison de la Tabagie, agrandie à cette occasion par de nouvelles constructions achevées en 1859. Cette réunion est effective dès 1857. La prison, qui prendra le nom de prison Charles-III une fois la rue de Grève ainsi dénommée en 1867, fonctionnera jusqu'à sa fermeture en 2009 et sa destruction en 2010. Les établissements pénitentiaires du département sont placés sous l'autorité directe du préfet, puis sont délégués à un directeur à partir de 1858, charge exercée par le directeur de la circonscription pénitentiaire à partir de 1873.

Les rapports, règlements intérieurs et inventaires du mobilier conservés dans le présent fonds renseignent sur l'activité de ces maisons pour la période 1796-1855.

Dépôts de mendicité

Les dépôts de mendicité, compromis entre la prison et l'hospice, constituent des établissements de lutte contre la pauvreté, ce depuis leur création sous l'Ancien Régime. À partir du XVIe siècle, la stigmatisation du « faux pauvre » valide face au « vrai pauvre » malade et infirme s'affirme peu à peu et durablement dans une société qui valorise le travail et le domicile fixe.

Au XVIIe siècle, dans le royaume de France, la monarchie conduit une politique d'enfermement des mendiants et vagabonds en ouvrant des hôpitaux généraux dans la plupart des grandes villes. Face au nombre important de mendiants, les établissements hospitaliers, faute de moyens matériels et financiers, ne peuvent remplir leur rôle et endiguer le développement de la mendicité.

A Nancy, le couvent Notre-Dame du Refuge, situé rue Saint-Nicolas puis rue des Quatre-Églises, joue depuis 1624 le rôle de maison d'enfermement pour les filles publiques et de maison de correction pour les femmes et jeunes filles de conduite scandaleuse envoyées sur demande de leur famille. En 1691, le duc Léopold reconnait le dépôt de mendicité du faubourg Saint-Charles.

Parallèlement, suite au départ du régiment d'infanterie en 1727, le quartier (caserne) Saint-Nicolas, situé à l'angle de la rue Paille-Maille (rue des Fabriques) et de la rue du Faubourg Saint-Nicolas, devient la « maison de force, de correction et de travail » dirigée par le bureau de l'aumône publique.

L'arrêt du Conseil d'État du 21 octobre 1767 vise à l'instauration d'une maison de force, dit dépôt de mendicité, dans chaque généralité du royaume, aux frais du roi et placés sous la direction des intendants. Ces dépôts relèvent donc de l'autorité et de la responsabilité financière exclusive de l'État. Les mendiants et vagabonds arrêtés y sont enfermés, comme ceux qui demandent à y rester, aveugles, vieillards, mendiants valides, filles publiques. Par la suite, la population des dépôts s'étend aux infirmes, aux incapables et aux aliénés. Confrontés à des populations en grande détresse physique et mentale, les dépôts de mendicité développent de plus en plus une fonction d'assistance et deviennent des établissements intermédiaires entre la prison et l'hôpital.

En 1770, sous le régime français, la « maison de force, de correction et de travail » de Nancy change de nom en celui de « maison de réclusion et dépôt de mendicité », nom qu'elle conserve jusqu'à la Révolution. Elle accueille les mendiants valides ramassés par la maréchaussée, les vieillards sans domicile, les aliénés et les prostituées.

La Révolution française met un terme à l'existence des dépôts de mendicité, du moins officiellement, car en pratique, beaucoup continuent de fonctionner. La recréation des dépôts par Napoléon viendra légaliser une situation de fait.

A partir de la Révolution, le couvent de Notre-Dame du Refuge accueille également mendiants et vagabonds. Les sœurs sont expulsées en 1793 et les bâtiments déclarés biens nationaux sont dévolus au département en 1795. Le préfet y installe un dépôt de mendicité portant le nom de « maison de répression et de secours » puis uniquement « maison de secours » à partir de 1809 lorsque les mendiants valides en sont écartés. Le dépôt reçoit les personnes atteintes de maladies vénériennes ou spéciales, les prostituées, les femmes enceintes, les vieillards abandonnés et les malades de l'esprit nécessiteux. En 1804, l'administration de la maison est confiée, toujours sous la surveillance du préfet, aux Dames hospitalières de Saint-Charles. Elle fonctionne au profit des départements de la Meurthe, de la Meuse et des Vosges.

Le décret impérial du 5 juillet 1808 interdit la mendicité et prescrit la création de dépôts dans chaque département destinés à accueillir « tous les individus mendiants et n'ayant aucun moyen de subsistances ». Le délit de mendicité et de vagabondage est définit par le Code pénal. Les mendiants et les vagabonds encourent des peines de trois à six mois d'emprisonnement, qui peuvent aller jusqu'à cinq ans, voire dix ans dans les cas de circonstances aggravantes. À l'expiration de leurs peines, ils sont conduits au dépôt de mendicité pour y effectuer une peine de travail ou mis à la disposition du Gouvernement « pendant le temps qu'il déterminera, eu égard à leur conduite ».

Le 29 janvier 1817, le préfet de la Meurthe prend la décision d'établir à la maison de secours départementale un dépôt de mendicité ouvert aux indigents de l'arrondissement de Nancy. Il accueille jusqu'à deux cent malades à la charge du département.

A partir des années 1830, le conseil municipal de Nancy porte un intérêt croissant à la prise en charge de la mendicité. Un établissement communal est nécessaire pour seconder la maison de secours départementale dans l'accueil des mendiants invalides et des mendiants valides condamnés pour vagabondage. Le projet d'un dépôt de mendicité est débattu à la séance du conseil municipal du 18 février 1841. Pour suppléer à la faiblesse des finances communales, une souscription publique est organisée dès le mois suivant pour en financer la construction. L'opération est un succès, d'autant plus que le comte Barbe-Hyacinthe de Raugraff (1780-1839) lègue par testament 200 000 francs à la ville pour des œuvres de bienfaisance. L'établissement ouvre ses portes le 1er décembre 1843, rue du Château-Carré (rue Saint-Léon depuis 1867), en face de l'actuelle église Saint-Léon.

Le règlement du dépôt de 1843 précise que l'établissement « est destiné à recevoir les mendiants invalides des deux sexes ayant leur domicile de secours dans cette ville. Y sont également admis les mendiants valides, domiciliés à Nancy depuis au moins un an, qui ont été traduits devant les tribunaux, lorsque les jugements de condamnation l'ont ainsi ordonné » (art 1). Contraints au travail, « les mendiants admis dans l'établissement y restent jusqu'à ce qu'ils soient reconnus en état de travailler de manière à pouvoir se procurer des moyens d'existence, ou que leurs familles les réclament » (art 6). Au sein de l'ouvroir et des dortoirs, la séparation entre hommes et femmes est stricte. Des espaces sont réservés aux jeunes et aux invalides. Le dépôt comprend également une infirmerie. Les reclus sont occupés à un travail industriel par la réalisation d'ouvrages à façon. Un tiers du produit de leur travail leur revient tandis que les deux tiers reviennent au dépôt en indemnisation des frais engagés par la commune pour leur entretien. La correspondance révèle une certaine curiosité de la part d'autres municipalités comme Troyes, Reims ou Saumur, désireuses de connaître les actions menées à Nancy et la réglementation en matière de répression de la mendicité.

Suite à la décision du Conseil municipal du 26 septembre 1873, le dépôt de mendicité fait place à l'hôpital Saint-Léon, annexe de l'hôpital Saint-Charles, qui accueille le service de chirurgie. Les reclus hommes sont envoyés à l'hôpital Saint-Julien, les femmes à la maison Saint-Mathieu tenue par la congrégation des Sœurs de Saint-Charles. L'hôpital Saint-Léon est supprimé en 1883. En 1887, les locaux accueillent alors l'école primaire supérieure de jeunes filles préparant au brevet élémentaire, avant sa suppression au profit du collège moderne en 1941.

La maison de secours départementale de la rue des Quatre-Églises est transformée en 1880 par la Faculté de médecine en clinique de dermatologie et de syphiligraphie à laquelle sont adjointes la clinique obstétricale et la maternité. En 1914, la clinique quitte la maison de Secours pour intégrer l'hôpital Maringer.

Le projet d'un dépôt de mendicité départemental évoqué dès 1847 est relancé suite à la fermeture du dépôt de Saint-Léon. En 1874, une commission du conseil général de la Meurthe-et-Moselle est chargée d'en étudier la faisabilité. Le projet est reporté pour des questions financières. Le Conseil général accepte le 22 août 1889 la proposition du propriétaire du château de Bellecroix à Faulx, de céder son bien avec un hectare de jardin contre 30 000 francs, afin de le transformer en dépôt de mendicité. Les frais sont partagés pour moitié entre le département et la ville de Nancy qui connaît des difficultés de gestion face à l'afflux de mendiants. Le règlement intérieur est fixé le 10 août 1891 et l'établissement ouvre ses portes le 15 janvier 1892. En 1902, il accueille une cinquantaine de personne : des reclus qui y séjournent en moyenne de 3-4 mois et quelques hospitalisés. Les documents conservés ont trait à l'administration du dépôt pour la période 1890-1902 ; à noter la présence de dossiers nominatifs de placement (1892-1895).

La sous-série 4 I compte 72 articles et occupe 5,03 mètres linéaires.

Date de l'unité documentaire 1790-1945

Description physique

Nombre d'éléments

72 articles

Métrage linéaire

5,03

Dépôt

Archives municipales de Nancy

Origine

Ville de Nancy

Informations sur les modalités d'entrée

Versement

Informations sur l'évaluation

Des registres de comptes (grand livre, journal général, journal de caisse et livre de détail de la caisse) de l'année 1871 ont été détruits car non utilisés par l'administration.

Statut juridique

Archives publiques

Communicabilité

Librement communicable

Sources complémentaires

Sources internes

Prisons :

- 1 M 180, Prisons (1907-1937).

Dépôt de mendicité de Nancy :

- 1 GG 189, Registres paroissiaux, sépultures (20 avril 1771 - 26 décembre 1792) ;

- 3 M 68-71, Bâtiment (1840-1873) ;

- 1 Fi 3872-3877, Projet aménagement d'une école primaire supérieure : plans (1870-1880) ;

- 1 Fi 5160-5182, Construction : plans (1842-1843).

Dépôt de mendicité de Faulx :

- 1 BA 107/29, Rapport du préfet et délibérations du conseil général de Meurthe-et-Moselle (1889).

Sources externes

Archives départementales de Meurthe-et-Moselle :

- L 4296-4301, Maisons d'arrêt de Nancy, Toul, Lunéville (1791-an VIII).

- 1 Y 1 - 2 Y IV 91, Établissements de répression (an VII-1940) ;

- 2 Y III 1-305, Prisons de Nancy (an II-1943) ;

- 4 N 36-37, 122-123, Administration et comptabilité. Prison de Nancy (1810-1946) ;

- 4 N 68-68 bis, Administration et comptabilité. Maison de secours de Nancy (an VII-1922) ;

- Q 334, Dépôt de mendicité de Nancy : registre matricule (1843-1873).

Archives nationales :

- F 16/1104, Dépôt de mendicité : Meurthe (an 12-1822) ;

- F 15/2797-2798, Dépôt de mendicité de la Meurthe : comptabilité (1780-an VIII) ;

- F 16/1139, Dépôt de mendicité de la Meurthe : plans et devis (1809) ;

- F 16/152, 261, 516, 711-712, 819, Prisons de la Meurthe : mouvements et comptabilité (an II-1817).

Bibliographie

Prisons :

- CONRAUD, J.-M., Charles III, une prison en ville : L'histoire de l'enfermement à Nancy, Éditions Serpenoise, 2009.

Dépôt de mendicité :

- BOUVIER, J.-J., dit Lionnois, Histoire des villes vieille et neuve de Nancy, depuis leur fondation jusqu'en 1788, 200 ans après la fondation de la ville-neuve, t. 3, Nancy, 1811. p. 219-221 ;

- CAYON, J., Histoire physique, civile, morale et politique de Nancy, ancienne capitale de la Lorraine, depuis son origine jusqu'a nos jours : avec nombre de figures et de plans, Nancy, 1846. p. 244-250. (BH 1011) ;

- CRISENOY de, J., « Les asiles d'incurables et les dépôts de mendicité », Revue générale d'administration, 1888, vol. 3, n° 1, p. 5-20 ;

- COURBE, C., Les rues de Nancy, T. 2, Nancy, 1886. p. 96-102. (BH 11) ;

- KITTS, A., « Mendicité, vagabondage et contrôle social du moyen âge au XIXe siècle : état des recherches », Revue d'histoire de la protection sociale, 2008, vol. 1, n° 1, p. 37-56 ;

- PENY, C., « Les dépôts de mendicité sous l'Ancien Régime et les débuts de l'assistance publique aux malades mentaux (1764-1790) », Revue d'histoire de la protection sociale, 2011, vol. 1, n° 4, p. 9-23 ;

- Ville de Nancy, Règlement pour le service intérieur du dépôt de mendicité de la ville de Nancy, Nancy, 1843. 16 p. (4 I 8) ;

- Ville de Nancy, Règlement particulier pour les maisons départementales d'arrêt, de justice et de correction de Nancy, Nancy, 1843. 8 p. (4 I 5).

Rédacteur de la description

Alexandre Brignon, supervisé par Germain Dufay sous la direction de Daniel Peter, conservateur

Descripteurs

Cotes extrêmes

4 I 1-72